Le président du Venezuela, Hugo Chávez, qui est revenu dans son pays lundi 4 juillet comme l’avait annoncé le vice-président, Elías Jaua, afin d’assister aux festivités du Bicentenaire de l’Indépendance (cérémonie qui s’est tenue le lendemain), pourrait souffrir d’un cancer du côlon. Ces informations ont été divulguées vendredi dans le ‘Wall Street Journal’, des révélations qui s’appuierait sur les témoignages de deux personnes proches du mandataire socialiste.
Le président du Venezuela, Hugo Chávez, avait reconnu le 30 juin lors d’une allocution télévisée qu’il souffrait d’un cancer et qu’il avait été contraint, à ce titre, de subir une seconde opération afin de retirer les cellules malignes. Cette révélation avait été faite par le chef de l’État en personne lors d’une courte allocution (d’environ 15 minutes) prononcée depuis la Havane où il se trouvait en convalescence depuis le 11 juin, date à laquelle il avait subi une première opération en urgence afin de retirer un abcès pelvien (une accumulation de pus dans la zone inférieure de l’abdomen). Chávez a fait son retour lundi à Caracas et a informé la population qu’il avait dû être opéré une première fois, en urgence, le 11 juin pour un abcès abdominal (il se trouvait en déplacement officiel sur l’île) puis le 20 juin afin d’extraire une tumeur cancéreuse révélée lors de la première opération. Aujourd’hui le chef de l’État suit, selon ses propres dires, un traitement strict pour venir à bout de son cancer sans toutefois préciser les modalités de sa thérapie ni la localisation exacte de sa tumeur maligne. Sans que l’information ait été officiellement révélée par le principal intéressé, il semblerait que le président souffre d’un cancer colorectal qui, selon les spécialistes, possède un taux de guérison avoisinant les 90 % lorsque la tumeur est traitée rapidement et qu’elle n’est pas à un stade avancé. Un spécialiste de l’université de Californie, Alan Venook, a souligné que la présence d’un abcès coïncidait souvent avec le diagnostic d’un cancer du côlon tout en ajoutant que selon descriptif effectué par le propre chef de l’État, le cancer de Chávez, devrait se situer à un stade deux ou trois. La première phase suppose la pénétration de la tumeur à travers la paroi du côlon sans que celle-ci n’atteigne les ganglions lymphatiques tandis que l’autre phase implique une atteinte des ganglions lymphatiques sans qu’aucun autre organe ne soit touché. Habituellement, le recours à une chimiothérapie est essentiel en phase trois et améliore les chances de guérison au-delà de cinq ans dans plus de 70 % des cas, contre 50 % sans l’usage de la chimiothérapie.
Visiblement amaigri et fatigué, Hugo Chávez n’a pu assister que de loin au fastueux défilé militaire et aux multiples festivités qui se sont tenues à l’occasion du Bicentenaire de la Déclaration de l’indépendance. En effet, il n’a pu assister au défilé qui s’est tenu au Paseo de Los Próceres, un évènement central de la célébration, il s’est contenté de saluer les participants via un message télévisé qui fut retransmis depuis l’un des salons présidentiels.
« Je suis en convalescence » a-t-il déclaré depuis le salon Simón Bolívar du Palais de Miraflores. Le chef de l’État de 56 ans accompagné du chef des armées, a malgré tout lancé à distance le début du défilé de façon officielle. Les chefs de l’État de l’Uruguay, du Paraguay, et de la Bolivie, ont assisté à la célébration puis se sont réunis avec le Vénézuélien dans le palais présidentiel. Le ministre des Affaires Étrangères vénézuélien, Nicolás Maduro, a déclaré aux journalistes « que la réunion avait été un plaisir et que Chávez était ému, et heureux de travailler ».
Chávez en personne n’a pas manqué de saluer les trois chefs de l’État qui avaient fait le déplacement au Venezuela, Fernando Lugo, Evo Morales et José Mujica en déclarant « merci pour votre présence, cela constitue une injection très salutaire ». Il a salué en particulier le président Fernado Lugo, 60 ans, qui lui aussi a été soigné pour un cancer il y a dix mois « Je te remercie mon Frère Président, je sais que tu es passé par une situation difficile toi aussi, je te remercie non seulement pour ta présence physique mais aussi spirituel ».
Il a également remercié sur son compte Twitter, la Russie et la Chine pour lui avoir vendu les équipements militaires « qui permettent au Venezuela de jouir d’une vraie force armée ». Le gouvernement du Venezuela a acheté à Moscou 100 000 fusils fusiles Kalashnikov AK 103, 53 hélicoptères, 24 avions Sukhoi ainsi qu’un lot de tanks et à la Chine des radars longue portée JYL-1, et des avions K-8.
Le président bolivien, Evo Morales a déclaré « nous rentrons très contents, j’ai vu le compagnon Chávez revigoré après ces deux interventions chirurgicales à Cuba » avant d’ajouter « il a été brillant comme à chaque fois avec ses réflexions sur l’unité latino-américaine ».
Le 7 juillet H.Chavez, qui montre qu’il est toujours à la tête du pays, a visité L’Académie militaire de Caracas où il a déclaré « J’avais une tumeur maligne et je continue à lutter contre elle, mais je vous promets que nous vivrons et vaincrons » avant d’ajouter « Vous savez que je suis dans un de ces guet-apens de la vie. J’ai toujours été un soldat sain. Je ne me souviens pas avoir été une seule fois à l’infirmerie ».
Depuis son opération, M. Chavez doit suivre un traitement médical strict et réduire ses apparitions publiques, mais il a affirmé qu’il refaisait du sport. « Je revis », a-t-il dit. Le président a reçu le soutien de la présidente brésilienne, Dilma Rousseff qui lui a proposé de se faire soigner dans un hôpital spécialisé de São Paulo ou même de lui envoyer des médecins. Il a remercié son homologue, qui a elle aussi vaincu la maladie, par téléphone, en lui précisant qu’il allait étudier sa proposition.
Le chef de l’État du premier pays latino-américain exportateur de pétrole, élu pour la première fois en 1998, a déjà annoncé qu’il voulait se présenter à la présidentielle de 2012. Son état de santé laisse pourtant une porte ouverte à de multiples interrogations quant à l’avenir politique du pays.
Le MUD ou Mesa de la Unidad Democrática, parti qui s’oppose au PSUV (parti du président en place), dans un message publié il y a quelques jours, a prôné un nouveau modèle économique basé sur la productivité et le respect de la propriété privée « Nous souhaitons conquérir le rêve d’un Venezuela libre, juste, digne, souverain et indépendant ». Il défend également l’idée « d’un modèle éducatif d’excellence ». Une opposition qui voit dans l’état de santé chancelant du président une opportunité de renouveau pour le pays alors que s’annoncent les élections 2012.
Au niveau de l’Amérique Latine, la santé d’Hugo Chávez semble constituer une question vitale pour de nombreux pays non seulement en raison d’une filiation idéologique mais surtout en raison d’une grande dépendance économique vis-à-vis de Caracas en particulier Cuba, le Nicaragua, la Bolivie ou dans une moindre mesure l’Équateur qui craignent une rupture dans les échanges commerciaux si le mandataire venait à quitter, malgré lui, le pouvoir.
Le président chilien, Sebastián Piñera, qui se trouve en visite officielle au Mexique, a quant à lui opposé deux blocs, d’un côté le Venezuela, Cuba le Nicaragua, la Bolivie, l’Équateur, et d’un autre côté le Mexique, le Brésil, la Colombie, le Pérou et le Chili en déclarant « C’est légitime que les pays choisissent leur propre chemin, mais je pense que l’une de ces deux visions ne conduit nulle part ». Il a également ajouté « les vénézuéliens, cubains et nicaraguayens sont libres de choisir leur modèle, mais au XXI croire à un modèle basé sur une économie socialiste dans lequel l’État est le principal moteur, constitue une erreur ». La campagne électorale 2012 risque d’alimenter les passions bien au-delà des frontières vénézuéliennes.