Hier, dimanche 24 novembre, ont eu lieu au Honduras, pays d’Amérique centrale gangrené par la violence et la corruption, les élections présidentielles permettant d’élire le chef de l’état au premier tour, la Constitution ne prévoyant pas de deuxième tour électoral. C’est le candidat du parti au pouvoir, le Parti national (PN), Juan Orlando Hernández, avocat de 45 ans, qui a remporté officiellement le scrutin, une victoire validée par le Tribunal suprême électoral (TSE).
Le candidat de droite Hernández a réuni 34,27 % des suffrages après le dépouillement d’environ 54,47 % des bulletins de vote, il devance la candidate du parti Liberté et Refondation (LIBRE), Xiomara Castro de Zelaya, qui aurait, quant à elle, récolté 28,67 % des suffrages. Quelques minutes avant l’annonce officielle du président du Tribunal suprême électoral, Mme Castro s’est déclarée vainqueur des élections via son compte officiel sur le réseau social Twitter « avec les résultats que j’ai reçus à la sortie des urnes de tout le pays, je peux vous le dire, je suis la présidente du Honduras ».
Un revers improbable pour la candidate de gauche qui a vu son rival remporter finalement la victoire, ce dernier a d’ailleurs promis qu’il gouvernerait « pour tous les Honduriens ». Il souhaite offrir un meilleur avenir à la population en favorisant le retour des investisseurs sur le territoire afin de permettre la relance de l’économie, sans oublier son engagement pour gommer les disparités sociales de plus en plus flagrantes.
Il s’est engagé à mener une « lutte frontale » contre la corruption affirmant qu’il se mettrait au travail dès aujourd’hui pour « soutenir les gens le plus humbles et pauvres ».
Le numéro deux du parti PN, le maire de Tegucigalpa, en a appelé à l’opposition pour qu’elle reconnaisse la victoire de son leader sans créer de dissensions au sein de la population « il a quelques minutes nous avons écouté notre sœur du parti de l’opposition, mais nous n’acceptons pas que le peuple soit divisé à nouveau en créant de la confusion alors qu’elle déclare avoir gagné » ajoutant « Hernández a déjà reçu des nombreux appels de plusieurs candidats de l’opposition qui reconnaissent la victoire du PN. J’appelle les autres partis pour qu’ils reconnaissent avec humilité le triomphe de Hernández, car il s’agit du président élu ».
Deux candidats revendiquent la victoire présidentielle, mais Juan Orlando Hernández est donné en tête par le Tribunal suprême électoral (TSE)
Le nouveau président du Honduras a d’ores et déjà reçu les félicitations du président du Salvador et du président du Panama, respectivement Antonio Saca et Ricardo Martinelli, comme a tenu à le souligner Ricardo Álvarez.
La campagne de M.Hernández a été centrée sur le principal problème que doit affronter le pays à savoir l’insécurité. Il a promis la création d’un corps spécial armé, la police militaire, qui aura comme vaste mission d’en finir avec l’extorsion et la violence dont souffrent des milliers de Honduriens. Le Honduras est à ce jour, le pays sans conflit armé qui enregistre le plus grand nombre d’homicides de la planète selon le bureau des Nations unies contre le crime et les délits avec 86,5 assassinats pour 100 000 habitants. C’est aussi le pays d’Amérique centrale par lequel transite environ 90 % de la cocaïne que l’on retrouve sur le territoire des États-Unis, le fléau du trafic de drogue qui menace la population au quotidien.
Les élections d’hier se sont ailleurs déroulées sous haute surveillance, certains bureaux de vote étaient encadrés jusqu’à quatre militaires et six policiers. Cinq personnes ont malgré tout été assassinées lors d’une fusillade dimanche à proximité d’un bureau de vote, dans le département isolé de Gracias a Dios dans l’est du pays, une zone ravagée par le narcotrafic.
Environ 250 observateurs internationaux de l’Union européenne, des États-Unis et de la l’OEA ont été dépêchés sur place pour surveiller le processus électoral dans un pays où le président de la République est élu au premier tour avec une majorité simple et où le Tribunal suprême électoral juge du bien-fondé du recomptage des voix. Actuellement cette haute instance est présidée par un responsable du Parti national, ce qui ne rassure pas quant à la neutralité du Tribunal !
Le parti Libertad y Refundación de Honduras (LIBRE) a d’ores et déjà émis un communiqué ce lundi dans lequel il annonce ne pas reconnaître les résultats publiés par le Tribunal suprême électoral et demande à recompter les voix alors que la suspicion de fraude électorale plane fortement. L’ancien président hondurien Manuel Zelaya (renversé par un coup d’État en 2009, un événement qui a plongé le pays dans l’instabilité), époux de la candidate Castro, a rejeté les résultats en avançant « que les statistiques et enquêtes donnent gagnante Xiomara ».
Les élections présidentielles ont attiré un nombre record de votants, près de 61 %, ce chiffre était seulement de 49,9 % lors des élections de 2009 qui ont permis au président Porfirio Lobo d’accéder aux plus hautes fonctions de l’État.
Le nouveau président aura fort à faire quand on sait que le pays est le plus pauvre d’Amérique après Haïti, 71 pour cent de la population vivant dans une situation de pauvreté. Les autorités doivent faire face par ailleurs à une dette externe de 5 500 millions de dollars.
A l’heure actuelle, la principale préoccupation reste à savoir si le refus de l’opposition de valider les résultats électoraux ne risque pas de plonger un peu plus le Honduras dans le chao et la violence. En effet, des heurts sont à craindre au vu de la confusion qui règne.
(Aline Timbert)