Après avoir visité le Mexique depuis la ville de Mexico jusque dans les États du Chihuahua, de Guerrero,d’ Oaxaca et de l’État du Mexique, et avoir rencontré plus de 800 défenseurs de droits humains de 24 États, dont 60 pour cent étaient des femmes, le rapporteur de l’ONU sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, Michel Forst, a noté « des niveaux élevés d’insécurité et de violence auxquels sont confrontés les défenseurs du pays ». Il a rappelé, par ailleurs, un contexte marqué par le crime organisé, la corruption et la répression étatique, il a aussi noté qu’il était également « inquiet de constater l’arrestation et la détention arbitraire comme un outil pour faire taire les voix dissidentes et freiner les mouvements sociaux ».
« Dans de nombreux cas, on criminalise les défenseurs des droits de l’homme qui dénoncent les violations commises par les autorités », a-t-il affirmé en ajoutant que la majorité des enquêtes criminelles ne sont pas résolues ce qui « génère un sentiment d’impunité généralisée ».
En conclusion de sa visite, l’expert a présenté un rapport préliminaire avec une série de recommandations aux autorités et autres parties prenantes afin de renforcer la protection des militants des droits humains et de faciliter leur travail.
Dans une interview accordée à l’ONU au Mexique, Forst a fait mention d’une impunité pénale et d’un manque de volonté politique comme principaux obstacles pour évoluer positivement.
Durante mi visita de 8 días en #México me he reunido con + de 800 #defensores/as de #DDHH de + d 24 estados del país pic.twitter.com/EJzqo4wlMs
— Michel Forst (@ForstMichel) January 24, 2017
« Le taux d’impunité est très élevé. Nous parlons de près de 98 % d’impunité. Cela montre que quelque chose ne fonctionne pas dans le système juridique, la primauté du droit et l’application de la justice, » a-t-il noté, en réitérant la nécessité de l’exécutif d’aborder la question de l’impunité.
Il a également indiqué dans son « évaluation » que la situation est « très difficile et terrible » : « Il y a des attaques à leur encontre à tous les niveaux » en faisait également référence aux «campagnes de diffamation contre les défenseurs ».
Le rapporteur de l’ONU a déclaré que le plus grand défi du gouvernement d’Enrique Peña Nieto est le manque de volonté de la classe politique pour mettre fin à l’impunité.
Lo que espero del gobierno de #México ahora es tomar mis recomendaciones e implementarlas para proteger a defensores/as de #DDHH.
— Michel Forst (@ForstMichel) January 24, 2017
« S’il n’y a pas de volonté politique au plus haut niveau de l’État, cela ne changera pas parce que les gens, l’armée, la police et tous les niveaux et la justice ne seront pas disposés à entreprendre le changement », a souligné l’expert.
Cependant, après une rencontre avec le ministre de l’Intérieur, Miguel Ángel Osorio Chong, et le procureur général, Raul Cervantes Andrade, il a lui-même souligné l’engagement du gouvernement à reconnaître publiquement le rôle positif des défenseurs des droits de l’Homme et des militants.
Il a également salué les progrès du gouvernement fédéral et a noté que « le simple fait que le Parlement ait adopté une loi sur les défenseurs est un signe que le gouvernement reconnaît qu’il y avait un problème et a ensuite décidé de lancer un mécanisme pour la protection des journalistes et des défenseurs ».
Forst, qui, au début de sa visite, a condamné l’assassinat du militant écologiste Isidro Baldenegro, défenseur des forêts de la Sierra Tarahumara (Chihuahua), a également rappelé le combat de l’activiste Berta Caceres, au Honduras, qui a également été cruellement assassinée en mars 2016 après avoir reçu plusieurs menaces de mort qui n’ont pas été prises au sérieux.
« L’assassinat d’Isidro est un symbole, comme ce fut le cas de Berta Cáceres au Honduras, et les attaques contre ceux qui représentent des droits humains sur différentes questions, tels que l’environnement, est un signe que quelque chose ne va pas dans le pays et l’État a le devoir de protéger les défenseurs », a-t-il expliqué. Au cours des six dernières années, 38 femmes activistes ont été tuées au Mexique.
« Si l’État est incapable de protéger les symboles tels que Isidro, il envoie le signal que l’impunité est de règle et, que vous pouvez attaquer les symboles, alors vous pouvez attaquer les plus pauvres des pauvres. Nous avons vu les attaques contre les Indiens comme Isidro ou Berta Caceres qui luttent pour protéger leurs terres, les rivières, les lacs et font face à la puissance des entreprises qui ne les consultent pas », a-t-il ajouté.
Baldenegro, membre rarámuri de la communauté indigène, a été abattu la semaine dernière. En effet, son activité environnementale l’avait amené à recevoir le prix Goldman, également connu sous le nom de Green Nobel en 2005.
#Comunicado @CNDH y @ONUDHmexico condenan el homicidio de Isidro Baldenegro, defensor indígena del medio ambiente > https://t.co/a3tRrkjZmZ pic.twitter.com/fE8QUY00et
— ONU-DH México (@ONUDHmexico) January 20, 2017
Il a souligné que cette violence contre les défenseurs des droits, mais aussi les journalistes et représentants indigènes font du Mexique l’un des pays les plus dangereux pour ce secteur.
Dans son bilan préliminaire, le rapporteur se déclare préoccupé par l’utilisation des forces armées dans les fonctions de sécurité publique, mais aussi par l’absence d’un programme pour revenir à une approche de sécurité entièrement civile.
#Periodistas son tb otro grupo en riesgo en #México, sobretodo en #Veracruz, #Oaxaca, #Guerrero. Necesidad de protección pa #whistleblowers
— Michel Forst (@ForstMichel) January 24, 2017
Forst a effectué sa première visite au Mexique, à la demande du gouvernement lui-même, où il est arrivé le 16 janvier et où il est resté jusqu’à ce mardi, afin d’évaluer « dans quelle mesure les défenseurs des droits de l’homme se sentent en sécurité dans le pays ».
(vidéo du 20/06/2016)