Paraguay : Les Ayoreo sont les victimes impuissantes d’une forme de tuberculose

Les derniers indigènes isolés du Paraguay vont-ils succomber à une maladie similaire à la tuberculose ? Triste nouvelle, de nombreux natifs ayoreo décèdent avec rapidité d’une maladie qui présente des similitudes avec la tuberculose, c’est le cri d’alarme lancé par l’ONG Survival. Une épidémie mortelle menace les indigènes appartenant à la communauté ayoreo-totobiegosodes depuis qu’ils ont été récemment contactés, faisant craindre qu’une menace sérieuse plane sur les derniers indigènes isolés qui survivent en dehors de la forêt amazonienne.

paraguay15062014-2Comme tous les peuples indigènes isolés, les Ayoreo ne présentent aucune immunité contre les maladies véhiculées par des ‘étrangers’. Des experts locaux ont informé que les natifs répondaient négativement aux tests de dépistage de la tuberculose, bien qu’ils présentaient des symptômes quasi identiques, les privant d’un traitement médical adapté qui pourrait leur sauver la vie. Les parents isolés des Ayoreo demeurent à ce jour coupés du monde et vivent cachés dans la forêt, or si le gouvernement du Paraguay ne prend pas des dispositions pour faire des recherches sur cette maladie sérieuse, les totobiegosode pourraient être cruellement décimés.

Nixiwaka Yawanawá, un indigène yawanawá d’Amazonie brésilienne qui a rejoint Survival International pour défendre les droits des autochtones a déclaré « cela s’avère surprenant que le gouvernement du Paraguay n’adopte pas des mesures pour protéger le territoire des Ayoreo. On envisage un massacre lié à cette mystérieuse maladie, un crime véritable contre l’humanité qui a lieu devant les yeux du monde. Le gouvernement doit agir vite pour éviter le désastre ».

Les indigènes sont, chaque jour un peu plus, contraints de céder leurs terres ancestrales, la forêt du Chaco, aux éleveurs qui l’abattent et la brûlent pour la transformer en zones de culture ou d’élevage.

La plupart des Ayoreo-Totobiegosode qui, par la force des choses, ont dû abandonner leur habitat naturel, certains aussi récemment qu’en 2004, ont depuis souffert de maladies respiratoires rares.

paraguay15062014-4Or, le problème de déforestation est loin d’être réglé dans ce pays d’Amérique du Sud puisqu’un dernier rapport scientifique montre que la forêt du Chaco au Paraguay, le dernier refuge des indigènes ayoreo isolés, connaît le taux de déboisage le plus élevé du monde.

L’étude, qui a été réalisée par l’Université du Maryland, met en évidence que « les forêts du Chaco au Paraguay (…) connaissent une déforestation rapide en raison de la multiplication des fermes d’élevage. Il s’agit du plus haut taux de déforestation dans le monde ».

Des images satellites aussi révélatrices qu’effrayantes dévoilent la progression sans limites de la déforestation du Chaco entre 1990 et 2013 et révèlent que l’une des dernières parcelles de forêt restantes est le territoire revendiqué par les Ayoreo.

Comme de nombreux peuples natifs dans le monde, la vie des Ayoreo est directement liée à la pérennité de la forêt sur laquelle ils veillent depuis des millénaires.

Le ministère de l’Environnement du Paraguay a suscité il y a peu un mélange de consternation et indignation en accordant des licences d’exploitation de la forêt des Ayoreo à la compagnie brésilienne d’élevage Yaguarete Pora SA et à Carlos Casado SA (une filiale de la société espagnole de construction Grupo San José) en dépit du fait que cette forêt soit située dans une réserve de biosphère de l’UNESCO.

paraguay15062014-3Les Ayoreo isolés sont obligés de fuir devant l’avancée des bulldozers qui anéantissent leur forêt à toute vitesse sachant de plus que tout contact avec les étrangers peut s’avérer être catastrophique d’un point de vue sanitaire.

Dans un appel urgent au Rapporteur spécial des Nations-Unies sur les peuples indigènes, l’organisation ayoreo OPIT insiste sur le fait que « la protection des forêts et des territoires [des Ayoreo et des membres isolés de leur groupe] est vitale ».

« Les projets de développement de l’élevage de Yaguarete et de Carlos Casado sur la terre ancestrale des Ayoreo-Totobiegosode vont dévaster et faire disparaître leur système forestier et toutes leurs ressources naturelles ».

De son côté, le directeur de Survival International, Stephen Corry, a déclaré : « Cette tragédie n’arrive pas par surprise. Quand on impose le contexte du peuple indigène isolé avec la société étrangère, les maladies se propagent rapidement. C’est une preuve que le contact forcé n’est autre qu’une condamnation à mort pour les peuples indigènes. Cependant le gouvernement continu à ne rien faire pour protéger la vie des parents isolés et ayoreos. Au contraire il permet la destruction des forêts du Chaco aux mains des éleveurs brésiliens. Le Paraguay doit agir de lui-même pour protéger les vies des derniers indigènes isolés qui vivent en dehors du bassin amazonien ».

Stephen Corry, directeur de Survival International, a apostrophé les autorités en affirmant : « Pour combien de temps encore le Paraguay va-t-il se faire gloire de ses deux réserves de biosphère de l’UNESCO ? Avec le taux de déforestation le plus élevé au monde, le Chaco finira par disparaître et avec lui l’unique groupe d’Indiens isolés du pays. Le gouvernement paraguayen doit prendre des mesures d’urgence pour empêcher les éleveurs brésiliens de détruire son patrimoine avant qu’il ne soit trop tard pour le Chaco, et trop tard pour les Ayoreo ».

paraguay15062014-1L’incidence élevée du nombre de malades d’origine indigène, atteints de la tuberculose dans le pays, en majorité des communautés Enx et Ava guaraní, résidant dans le département de Presidente Hayes, reflète les mauvaises conditions socio-économiques des populations natives qui vivent, selon Carlos Morínigo, (directeur National des maladies respiratoires et de l’environnement) « dans des conditions de surpeuplement, dans des huttes regroupées en familles, où ils cuisinent, dorment et font leurs besoins de sorte que le risque d’infection est plus grand ».

Le respect des natifs au Paraguay, qui passe obligatoirement par la préservation de leur environnement indispensable à leur survie, n’est décidément pas une priorité. Malgré les menaces qui pèsent, rien n’est fait pour les protéger.  

En 2013, Chiri Etacore est le dernier natif décédé des suites d’une maladie respiratoire, comme d’autres membres de sa communauté il avait été expulsé de ses terres.

NB : La tuberculose est une maladie contagieuse, due au bacille de Koch (Mycobacterium tuberculosis). Cet agent infectieux est transmis par voie aérienne, via des gouttelettes contaminées par la bactérie en suspension dans l’air provenant des malades. L’inhalation d’un petit nombre de gouttelettes contaminées suffit à infecter un individu. Une personne tuberculeuse non traitée peut infecter de 10 à 15 personnes en moyenne chaque année – Pour en savoir plus : http://www.pasteur.fr/fr/institut-pasteur/presse/fiches-info/tuberculose#sthash.O9oYrSDR.dpuf

Un commentaire

  1. Le gouvernement paraguayen doit faire ceci, doit faire cela…

    Oui sans aucun doute, mais il faut se rendre compte que c’est aussi au gouvernement brésilien qui traite le Paraguay comme une sorte de colonie depuis plusieurs décennies qu’il faut demander d’agir (cf le traité d’Itaipu).

    Ce sont des sociétés brésiliennes, comme vous l’avez souligné, qui ici (et ailleurs au passage) ruinent la terre du Paraguay, avec le concours des élites paraguayennes (bien sûr…).

    Mais bon, quand on voit comme le Brésil traite ses indigènes, il est bien évident qu’il ne va pas modifier sa politique envers un pays juste bon à lui fournir de l’électricité à prix d’ami (via le barrage d’Itaipu) et ses terres cultivables au détriment des indigènes et des paysans locaux…

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